Le racisme, un regard qui classe sans appel

Article : Le racisme, un regard qui classe sans appel
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22 janvier 2015

Le racisme, un regard qui classe sans appel

angersmag.info
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Le racisme, c’est un chapitre qui a fait couler beaucoup d’encre dans l’histoire des Noirs et qui est loin d’être clos. Pour comprendre ce phénomène, on doit remonter dans le passé où les grandes découvertes de la Renaissance (la navigation autour de l’Afrique, la découverte des Amériques, etc.) ont confronté les Européens à l’existence de sociétés très différentes des leurs. Ce qui souleva des questions et de grands débats : les Indiens d’Amérique, les nègres d’Afrique étaient-ils des animaux ou des hommes ?

Certainement, pour les hommes de religion, ils étaient des créatures de Dieu à convertir. Pour d’autres, ils appartenaient à des espèces humaines inférieures. Ils étaient incapables de se gouverner par eux-mêmes. Des races supérieures doivent alors les humaniser et civiliser. De là, ces nègres étaient spoliés, réduits en esclavage, voire oppressés. En outre, dès la IIIe République, les manuels d’histoire présentent quatre « races » humaines en fonction de la couleur de la peau (les Blancs, les Noirs, les Jaunes, les Rouges), sans se soucier de la moindre rationalité scientifique. Et ces mêmes manuels tentaient ainsi de légitimer la colonisation, en soutenant la « mission civilisatrice » des « races inférieures » par la « race blanche »…

Les idéologues nazis, se basant sur tous ces préjugés historiques, nationalistes, racistes et antisémites, ont hiérarchisé les races, et souligné plusieurs niveaux de « discriminations ». Le peuple allemand était dit biologiquement supérieur à ses voisins, notamment au peuple français, alors qu’au contraire les Slaves étaient considérés comme des « sous-hommes » bien qu’étant « Blancs » et Européens ; quant aux juifs, ils étaient présentés comme une race biologiquement caractérisable et comme la plus « basse » de toutes. L’antisémitisme revêt donc l’une des formes du racisme. Une forme irréductible à toute autre, car au gré de l’antisémitisme, a été commis un crime de masse le plus organisé, voulu, et le plus indélébile de toute l’histoire de l’humanité.

En effet, en ces moments très agités où les miens – je parle des Noirs d’Afrique – endurent encore des discriminations, je crois qu’il faut davantage de luttes contre le racisme au nom de l’humanité. Lutter contre les discriminations, c’est s’engager à abattre les cloisons entre les sociétés. Montaigne, dès le début du 16e siècle, affirme que chaque homme porte en lui la forme entière de l’humaine condition : toucher à un homme, c’est toucher à toute l’espèce humaine. Deux cents ans plus tard, les philosophes des Lumières jugent nécessaire d’émanciper le genre humain, car c’est à l’humanité entière que s’adresse la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. La notion de « race » ne manifeste en aucun cas une réalité, mais un fantasme. Donc, les racismes n’ont aucun fondement scientifique. Ils constituent l’expression délirante d’appétits de domination, et de la crainte d’être dominés.

Comme l’injure et la diffamation, le racisme est condamnable, puisque la parole raciste se prononce toujours au préjudice des autres, et qu’il est incompatible avec le respect mutuel. D’ailleurs, l’article 1er de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 souligne que les hommes naissent et demeurent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. Ces textes révèlent alors l’inspiration de Montaigne proclamant que l’injustice faite à un seul Homme est toujours faite à toute l’humanité. Il s’ensuit alors que les droits sont indivisibles, mais aussi que les hommes sont égaux puisqu’on porte chacun en soi toute l’humanité. En effet, le racisme, si l’on comprend bien, va à l’encontre des droits universellement reconnus à tous, à raison de couleur de peau, d’origine ou d’autres critères.

Par ailleurs, il faut souligner que le racisme n’est donc pas un phénomène qui peut être dompté facilement. Certes, on ne naît ni raciste ni antiraciste. On ne naît pas non plus avec cette manière de penser. Mais, on naît égoïste. Pour moi, on n’aime les autres si souvent que parce qu’on n’a besoin d’eux. L’égoïsme enseigne donc l’amour. Le racisme est tout à fait empreint d’égoïsme. Le racisme se manifeste même entre Noirs. Les Noirs de teint clair se croient, pour la plupart, meilleurs que ceux de teint foncé. Toutefois, je n’oublie pas de reconnaître que c’est un fait culturel, un virus transmissible et redoutable. Il n’y a pas de sociétés sans frontières intérieures et sans préjugés. Le racisme, comme le disait Frantz Fanon, n’est pas un tout, mais l’élément le plus visible, le plus quotidien, pour tout dire, à certains moments, le plus grossier, d’une structure donnée. Cependant, lorsqu’on associerait au racisme des phénomènes de concurrence, il paraîtrait alors le pivot de rivalités économiques et sociales. Le racisme serait ici positif s’il constituait une piste d’émulation. Mais, né de l’ignorance, de crainte, de l’absence d’éducation aussi, il se fonde sur de fausses évidences.

Lorsqu’on me pose la question à savoir si l’on peut combattre les préjugés racistes, je réponds oui. Dans la mesure où l’on reconnaît l’humanisation comme un fait de culture. Dans la mesure où aussi l’école fournit tout un savoir sur l’humanité et sur le monde réel, en vue de faire comprendre et accepter les différences entre les êtres humains. Mais, qu’en est-il de ces écoles que les parents riches ou bourgeois veulent voir inaccessibles à des pauvres en exigeant eux-mêmes une éducation plus coûteuse ? La lutte contre les discriminations, notamment racistes, suppose d’abord un engagement vigilant de tous les citoyens attachés à l’égalité et à la démocratie. Elle suppose une prise de conscience d’appartenir à un même monde.

Eliphen Jean

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Commentaires

Dario Augustin
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Juste une petite mise en place, le racisme comme phenomene sociologique ne doit jamais etre separe entierement de l economique, au XVeme siecle il est apparu a posteriori de la decouverte pour justifier l exploitation des aborigenes sous le pretexte fumeux de la civilisation. Ces hommes avaient certes ete marque par toute la scolastique medievale qui basait la nature toute entiere sur le principe de hierarchie.
Avec les Lumieres, qu on ne s y trompe pas le meme mecanisme est en place, sauf qu on ne parle plus de convertir les ''sauvages''mais de leur donner la raison dont ils seraient prives, les philosophes des lumieres combattent l esclavage plus pour des principes economiques qu humanitaires. En effet le capitalisme naissant a compris qu il coutait beaucoup plus cher d entretenir un esclave a vie qu exploiter un pauvre type en lui payant un salaire de misere, c est pour cela que le premier pays abolitionniste fut l angleterre qui a ete le premier aussi a connaitre la revolution capitaliste.

sylvainj
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Intéressant point de vue sur le racisme
Merci pour cet article