25 janvier 2016

Haïti et les attentats de l’impérialisme

Tensions et manifestations a Port-au-Prince
Tensions et manifestations a Port-au-Prince

Les multiples valeurs qui fondent Haïti se dévaluent en faveur d’une démocratie qui ne colle pas. Les gouvernements, tous de mouvance despotique, adoptent des mesures d’exception qui réduisent les libertés citoyennes. Des gouvernements dont l’objectif est de rester au pouvoir à s’en rassasier jusqu’au dégoût. Des dirigeants virtuoses de la politique politicienne, des politicards vautours qui ne peuvent émaner que du fumier social.

La jeunesse comme fer de lance de la nation, doit, aujourd’hui plus que jamais, endosser les habits de soldats de guerre, contre les attentats de la colonisation, de l’impérialisme culturel et économique, contre tout un système de gouvernance politique, complice de cataclysmes et des fléaux de tout genre, qui maintient le pays dans le fouillis inextricable de ses crises. Crises qui paupérisent jour après jour les classes déjà défavorisées et le prolétariat.

Ne serait-ce que pour une cause commune, la jeunesse qui ne se fanera pas sur le fumier de la misère, à moins que ce soit pour son fruit qui doit être d’enlever son pays sous  le pesant harnais de l’occupation, proclamera un jour qu’Haïti est en nécessité de se défendre contre toutes ces formes d’attentats, contre la gérontocratie et cette démocratie paralysante, en mettant au goût du jour ses valeurs et ses forces, et de s’affirmer dans la lutte pour une nouvelle forme de société, une société évoluée.

Une détermination froide ne saurait mieux combattre les attentats dont il est ici question, les multiples crises dont le maquis terrifie la jeunesse montante, et la gérontocratie que je qualifie de primitive. Il faut une affirmation massive, des actions citoyennes positives et des discours logiques nuancés de valeurs élitaires. Ces discours ne doivent pas être la répétition angoissante et presque mot à mot de termes ou propos qui font rêver.

Peut-être par peur d’un naufrage collectif, ce qui n’est pas fondamentalement le cas, il faut cette posture martiale, des mesures d’engagement citoyen s’adressant à l’international pour dire qu’Haïti peut voler de ses propres ailes si l’on mise sur la force et les valeurs de la jeunesse. La jeunesse est le privilège incessible de la société, sa fine fleur, l’espoir du fumier social. Ces mesures s’adresseront aussi bien à ces classes dirigeantes, tracassières et frondeuses, que j’estime inamovibles depuis deux siècles déjà. Deux classes dirigeantes, à mon sens : la classe de l’opposition et celle au pouvoir. Je dirais plutôt deux classes au pouvoir. Enfin, autant de mesures qui doivent aussi s’adopter contre les écarts dramatiques du droit en faveur d’une constitution faite de lois qui semblent respectueuses pour la population haïtienne.

Si la jeunesse ne s’implique pas, si la jeunesse ne s’affirme pas au prix même de sa vie, il y aura toujours ce doute d’un progrès social, politique et économique possible qui s’instille jusqu’à confortablement s’installer dans les esprits. La caractéristique essentielle des mesures d’engagement est de relever de la conscience citoyenne, de cette reconnaissance d’appartenir à une même nation, et de voir Haïti comme une tâche à accomplir ou achever, comme un héritage légué par la gérontocratie dirigeante qui n’a jamais su jouer efficacement son rôle.  Et s’il faut périr, ce doit être par l’engagement à défendre sa nation et à la revitaliser, non par faute de connaissance, de conscience ou par indifférence.

Par ailleurs, ces mesures à adopter s’identifient à l’état d’urgence qui doit être la suspension du pouvoir populaire caractérisé par les manifestations souvent sanglantes, une régulation ou surtout une limitation des partis politiques qui n’ont aucun projet de société. La question à se poser est : pourquoi tant de partis politiques sans un tel projet? Ils s’identifient tous de gauche et de droite, ils augmentent au fil des ans, ils participent tous aux élections, rien que pour bénéficier du budget qui est disposé pour les campagnes électorales. Autant d’argent qui aurait mieux servi à créer des emplois, à créer des entreprises d’Etat… contre les ONG qui viennent carburer à la fortune.

Nul ne contestera, bien sûr, qu’Haïti est un pays fort et puissant, tenant compte de sa culture et tout ce qui fait de lui l’appât des Etats-Unis et de la France qui le colonisent encore. On devrait au moins douter que la colonisation puisse combattre réellement la pauvreté du colonisé, si ce n’est pour se pérenniser ou se fortifier. D’où l’ironie de l’assistanat international.

Toutefois, tout un risque est à reconnaître. Celui de ne pas mettre en danger les valeurs, le pays, au lieu de les défendre, au lieu de défendre réellement le pays contre les attentats de l’impérialisme. L’assistanat international, les ONG qui se nourrissent de la pauvreté du pays, ne font que l’enfermer jour après jour dans un piège mortifère : devra-t-il, par souci de développement, au nom de la défense démocratique et des accords diplomatiques  ou complomatiques1, abandonner un à un les principes qui l’ont fondé depuis plus de deux siècles déjà ?

Les grandes puissances nous mettent tous dans un nœud coulant où toute progression vers la victoire est impossible, où la fatalité a raison de nos capacités d’agir. Nous ignorons tous que nous désunir ou rompre l’unité nationale, est un point accordé aux colonisateurs insatiables, une béance offerte à leur rapacité.

 

Eliphen JEAN

1- Accords diplomatiques qui ne sont pas en faveur du pays…

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