Dans ma ville, après la pluie, c’est…
À l’école, dans des manuels scolaires, on apprend toujours qu’après la pluie, c’est le beau temps. Alors que la réalité dit tout le contraire. On fait même croire aux enfants que les pluies sont pleurs des anges que le tonnerre effraie, ou que Dieu pisse sur nos têtes. On leur inculque n’importe quoi. On parle donc de la pluie et du beau temps, c’est-à-dire qu’on dit des banalités.
La réalité, quant à elle, ne ment pas. Après la pluie, c’est la boue. On patauge dans la boue. On a l’impression de jouer aux dames avec des détritus hétéroclites, dont les rues sont parsemées, pour la plupart. C’est ce que je vis dans ma ville, Cap-Haïtien. C’est aussi le cas de certaines autres régions d’Haïti.
Elle s’appelle Cap. Vous savez pourquoi ? Une ville qui s’avance dans la mer, et qui risque de s’y noyer à n’importe quel moment. Il n’est pas nécessaire que les pluies soient diluviennes pour que les quartiers populaires soient inondés. Rien que d’imperceptibles gouttelettes… Et, s’il pleut à seaux, c’est plutôt la mer qui s’avance dans la terre. La mer est presque au niveau du sol. On peut donc comprendre comment les habitants de cette ville, les Capois, risquent d’être des Jésus, sans magie et sans rituel.
La ville de Cap-Haïtien est, en effet, en proie à des inondations permanentes. Permanentes, car il n’y a pas un bon système de canalisation. Les eaux restent stagnantes pendant longtemps, moyennant un bon soleil chaud. Heureusement qu’Haïti est un pays du soleil. Par ailleurs, je me demande si ce problème n’est pas lié à la mauvaise construction des maisons, et surtout à une surpopulation liée au dépeuplement des communes ou des campagnes qui se désertifient en conséquence. Les gens qui viennent des campagnes construisent comme ils veulent et où ils veulent. Ils doivent nécessairement trouver un endroit où construire. Ils construisent alors dans les ceintures populeuses de la ville, ils repoussent la mer. Comparez la mer à un sachet d’eau que vous pressez petit à petit dans vos mains… Vous comprendrez.
Enfin, on peut se demander pourquoi l’existence d’une mairie à Cap-Haïtien.
Eliphen Jean
Commentaires