Haïti : ruines et ruptures

Article : Haïti : ruines et ruptures
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5 juin 2015

Haïti : ruines et ruptures

niarela.net
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À ceux-là qui tiennent les rênes de l’Etat depuis des ans, à ceux-là qui se disent militants, mais qui militent au détriment des uns et des autres, à ceux-là qui s’opposent indéfiniment au pouvoir, à l’ensemble de la société haïtienne, il se pose, ici, une question qui devrait chaque jour se poser : quel modèle de société souhaiteriez-vous pour demain ?

Vu cette Haïti que nous avions depuis deux siècles déjà, qui va sans cesse à sa ruine et dont la ruine est entraînée par la rupture de l’unité nationale, et le fait que la société est, elle aussi, en rupture avec sa propre tradition ; vu cette vélocité avec laquelle la société se précipite vers sa propre ruine, une vélocité, pour dire comme Honoré de Balzac, comparable à celle d’une ombre, et avec laquelle un enfant se glisse sous le porche d’un escalier, il se donne lieu de parler de la rupture des espérances… d’où la nécessité d’avoir un modèle de société, de passer de la primitive à l’évoluée, d’avoir une société qui n’ignore pas les formes sociales et les techniques des sociétés dites évoluées.

A l’heure qu’il est, notre société a besoin d’être en rupture de ban, non avec sa tradition et les normes sociales… elle a, autrement dit, besoin de s’affranchir des contraintes de son état. Dès lors, il faut un regard pluriel sur l’effroyable complexité de la vie en Haïti. En d’autres termes, un regard sur la multiplicité des crises sociétales, la diversité des conditions de vie, et cette pluralité de partis politiques dans une même vision, dite vision de changer positivement le pays. Cette rupture à laquelle je fais ici allusion, exige une prise de conscience que nous sommes tous, Haïtiens, un seul peuple. Je veux souligner, ici, qu’il est vital que toutes générations confondues s’engagent, au-delà des préjugés qui s’opposent à l’émancipation complète de la génération montante, à faire renaître Haïti. Haïti doit renaître à l’espoir, comme une végétation au printemps. Cette génération montante est cette génération sacrifiée ; cette génération sacrifiée est cette jeunesse qui doit prendre la relève. C’est dommage que le fossé des générations ne fasse que se creuser davantage. N’est-il pas donc nécessaire un consensus intergénérationnel, un consensus social contre la crise générationnelle ?

En effet, le modèle de société dont il est question dans ce billet, doit être cette société libre des contraintes de son état, ou plutôt, des conséquences obligées et logiques des crises multiples qui frappent en cadence, et dont la cadence s’accélère au gré des ambitions politico-économiques. Une telle société doit alors sortir d’elle-même pour s’ouvrir au monde, elle a alors besoin de cette consolante inversion de mœurs corrompues, dissolues et relâchées, mais terriblement opérantes au fil de nos deux siècles… Où sont passées les valeurs morales, sociales, esthétiques de jadis ? A mesure de vouloir être libre, la société haïtienne s’aveulit considérablement sous le poids de son grand dénuement moral. Elle vit au mépris des normes et conventions.

Ruines et ruptures, caractéristiques criantes de la vie sociale en Haïti. Toutefois, peut-on parler simplement de ruptures d’équilibre, alors que les crises sont pérennes ?

Eliphen JEAN

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